La journée des Tuiles : une légende républicaine ?
Ayant lu « La journée des Tuiles à Grenoble par René Fonvieille », paru sur ce blog, un ami m’a rappelé un autre article paru en 2015 dans la revue grenobloise « Le Postillon » qui « démystifiait » la légende de « la journée des Tuiles comme première journée révolutionnaire, modèle de l’insurrection populaire. »
La "vérité historique" n'étant par définition que relative... (cf Paul Ricœur dans « Histoire et Vérité »), je vous livre donc ci-dessous les conclusions de cet article du « Postillon ».
MB.
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Je vous rappelle également l’autre article assez sidérant de Jean-Joël Duhot publié sur ce blog, à savoir que nos chers révolutionnaires auraient surtout agi pour faire fortune sur le dos de l’aristocratie et du peuple.
Par le jeu des appropriations et des ventes aux enchères (accessibles uniquement aux amis de la Révolution), les révolutionnaires vont acquérir au moins le cinquième de tout le patrimoine français pour une bouchée de pain …
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- D’où vient le « récit » de la Journée des Tuiles ? - Le Postillon - Mai 2015
Dans les jours qui suivent l’insurrection de la Journée des Tuiles en 1788 à Grenoble, les témoignages des contemporains et les écrits de la Presse constituent les premières formes de récit, plus ou moins fidèles à la réalité.
L’événement est rejeté : il faut désigner des coupables et rendre des comptes au Roi.
L’émeute fait peur, et on méprise le "petit peuple".
Les élites souhaitent oublier bien vite ce qui s’est passé : la journée des Tuiles est un souvenir honteux.
Pendant l’été, on rejette la violence sans pour autant abandonner les revendications et les idées parlementaires. Dès Août, les journaux internationaux de langue française et lus en France ne parlent plus que des assemblées des trois Ordres à Vizille.
Il n’est plus question d’évoquer le soulèvement populaire.
Pendant la Révolution, l’émeute en général se pare d’héroïsme, et dans les écrits, "le Peuple" se substitue à "la populace", crasseuse et dangereuse.
Un deuxième récit émerge, pleins de ces symboles. On y voit se développer une mythologie de l’insurrection du peuple combattant pour la liberté, contre les privilèges.
Le souvenir de la journée des Tuiles est éclipsé dans la tourmente d’épisodes révolutionnaires bien plus violents.
- Qui donc a créé la légende de la journée des Tuiles comme première journée révolutionnaire, modèle de l’insurrection populaire ?
Dans les années qui suivent la Révolution, l’événement grenoblois est très rarement évoqué dans les écrits historiques, dans lesquels il n’est qu’un fait mineur.
Les historiens de la première moitié du XIXème siècle ne rapportent pas les faits.
Ce n’est que Michelet, historien républicain, en 1867, qui embellit l’événement et contribue à lancer la légende, qui s’impose en 1888 au moment du centenaire.
La révolte est exaltée dans les journaux et les discours officiels.
On décide de la construction de la fontaine des trois ordres place Notre-Dame à Grenoble.
C’est aussi à cette époque qu’Eugène Chaper publie les relations grenobloises, un recueil de divers témoignages en lien avec la journée des Tuiles. Grâce à lui, l’événement est mieux connu.
L’idée d’une pré-révolution dauphinoise est mise en avant à Grenoble.
On peut penser que la journée des Tuiles est un mythe de la troisième république, un régime nouveau, né de la chute du second empire, en quête de racines historiques.
Depuis, on commémore toujours la journée des Tuiles à Grenoble, mais il semble que ce soit encore la même légende républicaine que l’on transmet dans les mémoires, quelle que soit l’appartenance politique.
https://www.lepostillon.org/Le-debut-de-la-Revolution-ou-une.html
Voir aussi ces articles :
La journée des Tuiles à Grenoble :
première émeute révolutionnaire ?
La Révolution de 1789 :
une monstrueuse légende urbaine ?